Novembre 1897
N° 101
Séance du 5 Novembre 1897
L'Amiral Canevaro communique à ses collègues cinq documents qui lui ont été adressés par le Président de l'Assemblée crétoise réunie à Melidoni (Mylopotamo) et relatifs :
1° À l'acceptation de l'autonomie par les Crétois,
2° Au choix du Chef de l'État crétois,
3° Au retrait des troupes turques,
4° À la composition de l’Assemblée crétoise,
5 À l’adoption d’un sceau et d'un pavillon pour l'État crétois.
Le doyen des Amiraux accusera réception de ces pièces au Président de l'Assemblée, en lui rappelant que dans leur séance du 26 Mai, les Amiraux n'ont pas reconnu de caractère officiel à cette Assemblée, et ne peuvent, pour cette raison, résoudre les questions traitées.
Ils ont pris toutefois connaissance de ces documents qu'ils remettront au Gouverneur de l'île quand il sera nommé par les Puissances, et auquel il appartiendra de répondre aux vœux exprimés.
Les Amiraux, informés du jugement rendu le matin par la Commission militaire internationale et condamnant aux travaux forcés à vie les nommés Kassapakis Mustapha et Kassapakis Mehmet, décident que ces condamnés seront provisoirement incarcérés à Spinalonga.
À bord du « Sicilia », à La Sude, le 5 Novembre 1897
Le Commandant Supérieur de la Grande-Bretagne signé : Harry Grenfell
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro

L'Amiral Canevaro
N° 102
Séance du 12 Novembre 1897
Un vapeur portant le pavillon anglais est venu relâcher à La Sude le 4 Novembre, par suite de mauvais temps.
Ce navire a été visité par les soins du Commandant Supérieur anglais.
Il se nomme « Triton », vient de Constantinople, appartient à un Grec des îles ioniennes (mais sujet anglais) : il est chargé de vivres que le Capitaine dit être destinés aux troupes turques et aux populations musulmanes des villes occupées, mais il ne possède pas les papiers de bord réglementaires et paraît être parti de Constantinople à l'insu du Consul d'Angleterre dont il porte le pavillon.
Dans ces conditions, le Commandant Supérieur anglais a décidé de séquestrer le navire jusqu'à plus ample information, attendu, aussi, que, d'après les renseignements pris, il affirmait qu'il aurait fait en Crète plusieurs voyages antérieurs sans acquitter les droits d'exportation (dîme).
Pour ce qui est du chargement, les Amiraux, désireux de soulager les misères dans la mesure de leurs moyens, et accédant à la demande du Commandant militaire Djevad Pacha, qui déclare que les vivres sont destinés aux troupes et aux malheureux habitants, autorisent le débarquement des vivres, sous la réserve qu’ils s'assureront de la nature des marchandises débarquées ; l'Amiral austro-hongrois se chargera de ce soin.
À bord du « Royal Sovereign », à La Sude, le 12 Novembre 1897
Le Commandant Supérieur italien signé : O. Cecconi
Le Commandant Supérieur de la Grande-Bretagne signé : Harry Grenfell
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke

Le Royal Sovereign
N° 103
Séance du 15 Novembre 1897
L'Amiral Canevaro donne connaissance aux Amiraux d'une lettre de Djevad Pacha (du 11 Novembre) dans laquelle le Commandant militaire ottoman se plaint des difficultés que rencontrent, pour rentrer en Crète, de la part des autorités internationales, les militaires isolés (officiers et soldats), qu’il a autorisés à s'absenter et qui viennent reprendre leur poste.
En présence de l'engagement pris dans cette lettre, par le Maréchal Djevad Pacha, de fournir les noms de ces militaires isolés avec les motifs de leur déplacement, aussitôt après leur retour en Crète, les Amiraux n'hésitent pas à donner des instructions à leurs Commandants Supérieurs pour les laisser débarquer librement dans l'île.
Quant à ceux qui se déplacent d'un point à l’autre du littoral, entre les villes occupées, leur ordre de service ou leur titre de permission leur servira de laissez-passer, comme le Maréchal en a été informé dans une lettre du 10 Novembre du Commandant Amoretti.
À bord du « Sicilia », à La Sude, le 15 Novembre 1897
Le Commandant Supérieur de la Grande-Bretagne signé : Harry Grenfell
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro
N° 104
Séance du 19 Novembre 1897
Les Amiraux ont reçu, de Monsieur Lyghonnes, une demande de concession, tendant à autoriser l'établissement en Crète, de trois lignes de tramway, et, particulièrement, d'une ligne qui relierait La Sude à La Canée.
En même temps, il leur a été demandé, par Messieurs Lyghonnes et Kelaïdis, d'autoriser la mise en place d'une ligne téléphonique circulaire de La Sude à La Camée et retour par Halepa.
Ces deux propositions sont bien fondées, les Amiraux les ont étudiées avec intérêt, et en souhaitent la réalisation., Mais au moment où la direction des affaires de l'île va passer de leurs mains dans celles d'un Gouverneur désigné par les Puissances, ils ne sauraient engager l'avenir et ne peuvent que conserver les dossiers pour les remettre à celui qui aura qualité pour trancher la question.
Messieurs Lyghonnes et Kelaïdis seront informés de cette décision des Amiraux.
À bord du « Sicilia », à La Sude, le 19 Novembre 1897
Le Commandant Supérieur de la Grande-Bretagne signé : Harry Grenfell
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro
22 Novembre 1897
Règles communes à suivre par les navires de guerre des six Puissances dans les eaux de la Crète
La convention suivante entre les Amiraux et Commandants Supérieurs présents en Crète est portée à la connaissance de Messieurs les Commandants :
1° Au mouillage de La Sude, le service de rade, qui consiste à visiter les navires marchands qui arrivent, quelle que soit leur nationalité, et à envoyer complimenter les bâtiments de guerre des six Puissances arrivant pour la première fois en Crète, est assurée par le doyen des Amiraux présents. Dans les deux cas l'officier chargé de ce service agit au nom de tous les Amiraux et Commandants Supérieurs présents.
Dans les autres mouillages de l’île, ce même service est assuré par le Commandant Supérieur de la localité.
2° Les navires de guerre des six Puissances qui arriveront pour la première fois à La Sude, soit pour se joindre à l’Escadre, soit pour relâcher, ne saluerons pas les pavillons des Amiraux présents, excepté celui de l'Amiral de leur nationalité, si ce salut lui est dû.
3° Les Commandants de ces navires ne feront pas de visite aux Amiraux et Commandants Supérieurs, mais à la première réunion du Conseil des Amiraux, ils seront présentés par leur Amiral ou Commandant Supérieur, aux autres membres du Conseil.
Aucune autre visite officielle ne sera échangée après cette présentation.
4° En dehors de La Sude et de La Canée, tout Amiral de la flotte internationale arrivant à un des mouillages de l’île sera salué par le navire du Commandant Supérieur, et, pendant son séjour dans la localité, son pavillon national sera arboré à terre, près de celui de la nation qui tient garnison dans la place.
5° En dehors des eaux de la Crète, ces conventions ne sont pas applicables.
À La Sude, le 22 Novembre 1897
N° 105
Séance du 30 Novembre 1897
Les deux compagnies de navigation Panhellénique et Pantaléon ont demandé l'autorisation de reprendre leurs voyages en Crète, interrompus par les derniers troubles.
Déjà, les Amiraux, pour favoriser le commerce de l’île, sont revenus sur leur détermination du 18 Juillet (PV N° 70), et ont laissé les voiliers, même sous pavillon grec, charger et décharger dans les ports de l’île, sous la seule réserve qu'ils observeraient les règlements de la navigation, qu’il paieraient les droits d'entrée et de sortie, qu’ils se conformeraient aussi aux diverses prescriptions que les Amiraux ont dû faire à cause de la situation actuelle de île de Crète.
Cette mesure sera étendue, à partir d'aujourd'hui, et sous les mêmes réserves, aux vapeurs portant pavillon grec ; mais pour garantir l'observation des conditions imposées, les Amiraux décident que les navires de la flotte internationale continueront à visiter les bâtiments de commerce et que :
1° Tout navire chargé de produits venant de Crète, qui ne pourra prouver qu'il a acquitté la dîme, devra, non seulement la payer, mais payer, en outre une amende équivalente à la moitié de cette dîme.
2° Tout bâtiment chargé, rencontré sans papiers de navigation, paiera une seconde amende de la moitié de la valeur de la dîme.
3° Ces deux amendes s’ajouteront, et le chargement lui-même servira de garantie au paiement.
4° Tout navire navigant sans papiers et non chargé sera saisi jusqu'à décision des Amiraux.
Une première application de cette règle sera faite aux trois voiliers visités par le croiseur Anglais « Scylla », qui sont actuellement séquestrés : le « Maroa » et « l’Evangelistria » à Candie, « l’Elpio » à La Sude, et auxquels les paragraphes 1 et 2 sont applicables.
En principe, les droits d'importation reviennent pour les 8/11e au Gouverneur ottoman et pour les 3/11e à la caisse consulaire ; toutefois comme les Amiraux viennent de recevoir une lettre des Consuls se plaignant du déficit considérable qui existe dans cette caisse, par suite de versements non opérés par le Gouvernement ottoman, ils décident que toutes les fois qu’il s'agira de rentrées de dîme dues exclusivement à l'intervention des navires de guerre, le droit (variable entre 10 et 13 %) qui revient en entier au Gouvernement comme droit de dîme, sera versé à la caisse consulaire jusqu'à extinction complète de l'arriéré qui s'élève à 234.000 piastres pour la période écoulée du 1er Septembre 1896 au 31 Août 1897, à 126.530 piastres pour les mois de Septembre et d'Octobre et continue à s'accroître depuis le 1er Novembre. Quant aux amendes, elles seront toujours versées à la caisse consulaire.
On demandera à Messieurs les Consuls le moyen pratique de percevoir et de faire entrer dans la caisse de la surtaxe les sommes ainsi obtenues.
Le Gouverneur Général par intérim a demandé aux Amiraux qu'une somme de 6.000 Fr. lui soit avancée à titre de prêt, par la caisse de la surtaxe, pour entreprendre la réfection de la route entre La Sude et La Canée, devenue impraticable.
Cette demande, appuyée par les Amiraux, a été transmise par le Corps consulaire, aux Ambassadeurs à Constantinople et l'emprunt a été consenti.
Le Commandant Amoretti a été chargé d'en informer Son Excellence Ismaïl Bey et de lui faire savoir que les travaux peuvent être commencés immédiatement, que la somme de 6.000 Fr. lui sera graduellement payée au fur et à mesure de leur avancement, et que le Colonel austro-hongrois Gruzek, qui appartient à l'Armée du génie, se mettra à sa disposition pour lui faire faire le travail dans les meilleures conditions de rapidité, d’économie et de bonne exécution.
À bord du « Sicilia », à La Sude, le 30 Novembre 1897
Le Commandant Supérieur de la Grande-Bretagne signé : Harry Grenfell
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro